En 2024, une situation de maltraitance signalée à ALMA 24 sur deux se déroulait au sein de la famille. Une donnée qui évolue peu d’une année sur l’autre. Parmi les personnes mises en cause, 40% étaient les fils des victimes, 23 % étaient les filles et 17% étaient les conjoints ou conjointes.
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Parfois, ce sont plusieurs membres d’une famille qui peuvent être présumés auteurs de maltraitance.
La maltraitance s’entend comme une situation de violence, d’abus ou de négligence à l’égard d’une personne (ou d’un groupe de personnes) en situation de vulnérabilité, de la part d’une personne qui est censé prendre soin d’elle(s).
La maltraitance est un ensemble de comportements (des choses que l’on fait ou, au contraire, que l’on ne fait pas) qui compromettent le bien-être, la santé, la sécurité et la dignité des personnes.
Concrètement, les situations de maltraitances dues aux membres de la famille sont en premier lieu des violences psychologiques et verbales : dénigrement, cris, intimidations, menaces, harcèlement…
Parfois, la violence exercée est physique, il s’agit de brutalité essentiellement. Par exemple, le fait de ne pas respecter le rythme de marche de la personne ou de réaliser des transferts brutaux. Plus rare, mais encore plus intolérable : il peut s’agir de coups.
Les victimes subissent par ailleurs des négligences, des privations : elles manquent de soins, d’alimentation adaptée, d’attention, elles vivent dans des logements mal entretenus, sans chauffage suffisant. En résumé, elles vivent dans des conditions de vie non adaptées voire non décentes.
La famille est parfois dans le déni des besoins d’un proche, refusant de voir son état de santé ou son autonomie se dégrader.
Une personne peut également être isolée. Son cohabitant peut empêcher les visites de tiers ou entraver sa liberté d’aller et venir. Les mis en cause peuvent vouloir s’immiscer dans sa vie privée ou imposer des décisions abusives, comme l’entrée en établissement non consentie.
Enfin, les situations intrafamiliales sont souvent en lien avec des questions d’argent : vivre au crochet d’un parent, tenter de le spolier ou simplement d’avoir la main sur ses comptes bancaires.
Les faits de maltraitances sont souvent multiples, associés au sein d’une même situation.
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Une prise de conscience difficile pour les victimes et les auteurs
Nous n’avons pas toujours conscience de porter atteinte à notre proche.
Par exemple, lorsque l’on retire son chéquier ou sa carte bleue à son parent vieillissant ou malade : on peut le faire dans le but de le protéger, de lui éviter d’être victime d’escroquerie.
Mais le faire sans le prévenir, sans lui expliquer les raisons, sans se concerter avec le reste de la famille, ou en dehors de toute mesure de tutelle ou de curatelle, est une atteinte à ses droits. Et de cette manière, cela peut s’apparenter à de la maltraitance (car c’est du vol), ou en tout cas, cela peut être vécu comme tel par la personne âgée ou handicapée.
Face à certaines situations, il peut y avoir une différence d’appréciation entre les membres de la famille, les professionnels ou la victime elle-même. Cette dernière peut ne pas avoir conscience ou même admettre l’idée d’être malmenée. Surtout lorsque la maltraitance est causée par une personne de confiance, une personne qu’elle aime.
De plus, les situations qui se déroulent dans le huis clos familial sont souvent difficiles à repérer pour l’extérieur.
D’ailleurs, si les maltraitances intrafamiliales sont les plus couramment dénoncées, elles le sont aussi principalement par la famille elle-même, qui en est le 1er témoin (en 2024, 40 % des appelants sont des membres de la famille et 20 % sont les victimes elles-mêmes).
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Les facteurs de risque spécifiques à la maltraitance au sein des familles
La fragilité de la victime, liée à un problème de santé, un handicap ou une perte d’autonomie est le facteur premier de maltraitance. Cette vulnérabilité entrave sa capacité à se défendre et à faire valoir ses droits. Mais elle est généralement accentuée par sa situation financière et un isolement social, familial, géographique. Tous ces éléments vont faire d’une personne une proie plus facile.
Par ailleurs, il est important d’avoir conscience à quel point l’histoire familiale rentre en compte dans les situations de maltraitance au sein des familles : les conflits (de couple, de fratrie ou entre les générations), les non-dits, les problèmes d’héritage et d’argent sont souvent au cœur de violences, de négligences, de non-respects des droits ou d’abus financiers.
La cohabitation est également un facteur de risque important : plus on est confronté au quotidien à son proche vieillissant, malade ou difficile à vivre, plus on risque d’avoir un comportement inadapté vis-à-vis de lui.
Une situation de maltraitance intrafamiliale peut également résulter d’un refus d’aide, qu’il vienne de la personne âgée ou handicapée ou de son proche : plus ce dernier est sollicité ou ne veut rien déléguer concernant l’accompagnement de son parent ou de son époux, et plus il risque de s’épuiser. Et donc d’avoir un comportement débordant, inadapté.
En dehors de l’épuisement des proches aidants, nous retrouvons régulièrement certaines caractéristiques chez les membres de famille mis en cause :
– les difficultés sociales, financières
– les fragilités psychiques comme la dépression, les troubles avec des sentiments de persécutions ou des tendances paranoïaques,
– l’appât du gain, l’envie de contrôler, d’avoir le pouvoir
– le caractère difficile
Maltraitance intrafamiliale : un sujet tabou
Autant l’actualité des dernières années a mis sur le devant de la scène médiatique les maltraitantes envers les personnes âgées ou en situation de handicap au sein des établissements, autant les maltraitances intrafamiliales restent dans l’ombre.
Cette omerta peut se comprendre par leur caractère intime, privé et, comme nous l’avons vu, par le fait que ces situations sont parfois difficiles à détecter.
Les victimes se taisent généralement par honte, par culpabilité, par peur des représailles ou du rejet, par crainte d’être placées en établissement pour être éloignées des mis en cause, ou tout simplement pour ne pas créer d’ennuis à leur(s) proches(s) qu’elles aiment malgré tout.
Les témoins, s’ils peuvent craindre également des représailles en dénonçant les situations, ont aussi parfois peur de créer ou d’accentuer des conflits ou de commettre une erreur, par manque de certitude. De plus, les témoins extérieurs à la famille n’osent parfois pas se mêler, s’immiscer dans les affaires familiales.
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Prévenir, repérer et accompagner les situations de maltraitances intrafamiliales
En octobre 2024, la HAS (Haute autorité de santé) publiait le guide Évaluation du risque de maltraitance intrafamiliale sur personnes majeures en situation de vulnérabilité visant à renforcer le repérage de la maltraitance chez les personnes majeures et vulnérables.
Ce guide aide à identifier et analyser les situations de vulnérabilité chez les personnes majeures et à détecter des signaux de maltraitance, à partir de grilles de repérage.
In fine, ce guide apporte les clés pour mieux protéger et accompagner les victimes des situations de maltraitances.
A ALMA 24, nous sommes convaincus que pour faire cesser la maltraitance, il faut commencer par comprendre les situations. Au-delà des faits : les relations familiales, les interdépendances, les histoires de vie et les enjeux familiaux.
ALMA 24, pour briser le silence
Depuis 16 ans, ALMA 24 propose une écoute anonyme, confidentielle, neutre et sans jugement aux personnes victimes ou témoins de maltraitance envers les adultes vulnérables.
2 permanences hebdomadaires : lundi et jeudi de 14h à 17h au 05 53 53 3977
En dehors de ces horaires, vous pouvez contacter le 3977, numéro national dédié à lutter contre les maltraitances envers les personnes âgées et les majeurs en situation de handicap.
Victimes ou témoins, composez le 05 53 53 3977
La maltraitance est une réalité, osons en parler !